L’Urgence du sens est le chapeau sous lequel seront édités tous ceux de mes travaux que je choisirai de publier en auto-édition. Pourquoi ce choix ?
Nous avons longtemps chanté les mérites du « sens de l’urgence ». Une aptitude indispensable à qui doit faire face au stress permanent de la vie moderne. Oui, nous avions le sens de l’urgence, et nous épuisions nos jeunes forces dans cette course. Au fil des années, l’urgence est restée, s’est même intensifiée, mais le sens s’émoussait secrètement. C’est alors qu’est né et a grandi le sentiment d’urgence du sens.
L’urgence du sens ne nous vient pas seulement à l’esprit, mais aussi au corps. Au temps des cathéters et quand les vrais enterrements viennent de commencer, comme le chantait Brassens, il devient étrangement urgent de répondre d’une façon ou d’une autre à la question du sens. Aussi, mon métier d’auteur consiste-t-il, aujourd’hui, à faire courir contre la montre une plume dont la trajectoire vise à explorer le mystère du sens.
Je n’écris pas pour dire ce que je pense aurait, dit-on, affirmé Emmanuel Berl, mais pour le savoir. J’ai fait mienne cette phrase programmatique de l’écrivain. Pour savoir jusqu’où je pourrai comprendre — ou non — un peu du sens de ma vie, de celui du monde, et même, ô ultime folie, du sens du sens. Bref, un objectif monstrueusement ambitieux et voué à l’inachèvement. Ça tombe bien : je n’ai pas envie d’arrêter !
PS : À toutes fins utiles, précisons que ce que je désigne par « sens » ne doit pas être assimilé à un but, un objectif, ni même à une ambition, toutes choses raisonnables par ailleurs. Peut-être le sens est-il quelque chose comme la condition d’existence de ces choses ? Le sens serait-il antérieur à la raison, serait-il sa loi ?