De grands appétits

L'URGENCE DU SENS

Page 2 of 3

Lieux

Le lieu* en voie de disparition ?

Après qu’avec un soin minutieux, la Révolution et l’Empire ont démembré les anciennes provinces et éradiqué les références toponymiques de l’Ancien Régime, nous autres post-modernes poursuivons ce grand œuvre. Nous en avons même perfectionné la technique. Désormais, de tous côtés, on s’active avec entrain à la Grande Déconstruction. Le lieu est menacé de disparition.

Vous n’y croyez pas ? J’exagère, pensez-vous ? Prenons l’exemple de la commune française de Thaon-les-Vosges. Savez-vous que, de janvier 2016 à décembre 2021, cette malheureuse ville s’est vue un temps affublée du nom de « Capavenir Vosges » ? Il aura fallu rien moins qu’un référendum local pour réussir à redonner son nom à la ville, et évacuer cette dénomination «marketing » ridicule.

Sans doute les responsables de cette pantalonnade étaient-ils bourrés de bonnes intentions, mais au siècle précédent, elle aurait été impensable. C’est ainsi qu’insensiblement nous nous affranchissons de l’enracinement et de l’histoire. Voici venir le temps des espaces indéfinis, des «territoires » sans identité.

Les lieux n’ont plus de nom, et c’est pourquoi ils disparaissent. L’étrangeté et la singularité plient le genou devant la statue de l’Égalité** qui nous délie brutalement de toute attache historique et de toute filiation.

Les lieux n’ont plus lieu

Dans le monde où les lieux n’ont plus lieu, les pays cèdent la place à des espaces offerts à tout et à n’importe quoi, y compris la laideur. C’est ce qu’on nomme « l’aménagement du territoire ». Désormais, il n’y aura plus de lieu, mais un espace indifférencié. Cet espace sera, horresco referens, un espace sans identité. Les coordonnées GPS nous suffiront pour positionner nos gigantesques éoliennes, les hangars bariolés de nos zones commerciales et leurs interminables parcs de stationnement.

Car la fin des lieux, c’est aussi l’ouverture de la grande saison du saccage. Le territoire est une étendue offerte sans défense. Si la montagne n’est plus sacrée depuis longtemps, on croyait naïvement intouchable la beauté des paysages de la France. On se trompait. L’ustensilité, comme une lèpre, ne laisse indemne aucune parcelle. Les nuits campagnardes sont désormais peuplées d’obstinés projecteurs qui clignotent inlassablement.

Sur l’horizon de paysages jadis majestueux, ces clignotants semblent nous répéter encore et encore : « Nous sommes les maîtres, et jamais plus nous ne vous laisserons nous ignorer. Dans la guerre de la technique contre l’humanité, comme dans celle de l’utile contre le beau, nous, les machines, nous sommes les vainqueurs, et notre victoire est définitive ».

Que signifie être au monde ?

L’onomastique, cet art de bien nommer les lieux, est-elle également en voie d’extinction? Déjà, les prépositions ont changé. On ne vit plus « à » Paris ou « à » Quimper. On travaille « sur » Paris et on a un client « sur » Quimper. De quoi cette substitution du « à » par le « sur » est-elle le signe ?

Ces prépositions définissent notre mode de relation avec les endroits en question. Dire « je vis à Strasbourg », c’est dire tout autre chose que « j’habite sur Strasbourg». Dans le second cas, je suis avec le monde selon le même mode qu’un téléphone avec la table sur laquelle il est posé. Dans le premier, j’habite humainement le monde, et ma relation avec le lieu est alors sous le signe d’une préposition qui semble dénoter une sorte de datif. Or, le datif est riche de nombreux usages, notamment l’attribution et l’appartenance…

Le datif est le cas des compléments qui répondent aux questions « à qui ? » « à quoi ? », « pour qui ? » « pour quoi ? » Voilà bien des questions qui sont dans l’ordre de L’Urgence du sens !

Ce qui fait naître le lieu

« Être au monde » se dit-il comme on dit « je donne ma vie à la patrie ou à la science», en une sorte d’offrande de soi faite au monde ? Symétriquement, cette offrande ne fait-elle pas aussi naître le monde pour moi ? Et chaque nouveau-né n’est-il pas en quelque sorte constitutif du monde lui-même, puisqu’il le rejoint et s’y incorpore ?

Mais s’agit-il vraiment d’un datif ? Dans l’éventualité où des lecteurs auraient des lumières sur cette délicate question, je serais heureux d’avoir leurs commentaires.

Quelque soit la réponse à cette question, il reste que la relation entre l’homme et le monde n’est pas celle d’un téléphone avec la table qui le supporte. En effet, il faut souligner que le mot « lieu » ne désigne pas une chose du monde. S’il le fait, c’est seulement dans le rapport que l’on entretient avec celles-ci. Pour qu’existe un lieu, il lui faut des habitants pour le nommer, l’aimer, le visiter ou le fuir, le redouter ou le détester, et pour s’en souvenir, en y laissant leur marque. 

Lieu : une souffrance qui ne se connait pas

Sans le savoir, nous souffrons de cette indifférenciation, de cette neutralisation  discrète et silencieuse de l’espace. Les lieux disparaissent, et les touristes, ces pèlerins sans pèlerinage qui s’épuisent dans leur quête sans Graal, le ressentent confusément. C’est pourquoi ils s’efforcent, maladroitement et sans y prêter grande attention, de ressusciter les lieux par de discrets rituels.

Car ces lieux répertoriés, valorisés, ces hauts lieux du tourisme, sont depuis longtemps banalisés, anonymisés. Qu’à cela ne tienne ! On jette des pièces dans le bassin d’une fontaine, on accroche un cadenas à la balustrade d’une passerelle, ou encore, on « fait un selfie » pour ponctuer l’instant. Ainsi les amoureux gravent-ils leurs initiales dans l’écorce de l’arbre dont l’ombre protégea les ébats.

N’en doutons pas, nous saurons encore inventer d’autres rituels. Des rituels qui ne se savent pas, mais qui nous permettent encore de laisser une marque.

(…) Une statue dressée, c’est la terre habitée,
Et notre humanité, des pierres empilées,
Qui dressent son totem, qui érigent son dieu.

Tumuli, cairns et colonnes épigraphiques,
Pierres repères des steppes asiatiques,
L’érection toujours fait exister le lieu.

extrait de « Lieux 1 », in « Caresse du monde », N°77,
Jean-Marie Sonet, ÉD. Books-on-demand (2021).

Marquer un lieu, c’est le faire exister. Dans le monde d’avant, quelques pierres empilées y suffisaient, un monument, un signe pour marquer une frontière, un pèlerinage ou une tombe… Cette souffrance qui n’a pas lieu, qui ne se connait pas, souffrance silencieuse mais bien réelle, sert de toile de fond aux huit poèmes regroupés dans le n°10 du feuilleton poétique de l’année 2022. Ce numéro est disponible en e-Book chez l’éditeur.

* Non, il ne s’agit pas du poisson !
** Je propose ici un projet pour ladite statue de l’Égalité, dans le style « réalisme soviétique » (style de circonstance..). Son érection est urgente ! Je songe à ouvrir une souscription…

Bêtise et Niaiserie

La bêtise est une cache, une souille où se peuvent réfugier paresseux, obstinés et planificateurs. On y est à son aise, ce qui n’est pas rien. Qui n’a jamais goûté sa tendre protection ? 

Bêtise, Niaiserie et leur cousine Naïveté restent pourtant des relations compromettantes. On feint de ne les pas connaître ou reconnaître. La Fontaine et Molière les moquèrent. L’intelligence et l’instruction se liguèrent pour les faire taire, à vrai dire sans guère de succès jusqu’à présent.

Les sept poèmes de ce numéro 9 du feuilleton poétique de l’année 2022, veulent leur ménager officiellement une voix au chapitre, car elles portent aussi leur part de vérité, de notre vérité. Ils plaident pour la reconnaissance de ces qualités décriées et moquées. Que celui qui ne s’est jamais senti bête nous jette la première pierre !

La bêtise comme antidote au « wokisme »

N’ayons pas peur de la bêtise, ni de la niaiserie. Acceptons de les voir surgir dans nos vies avec cette éclatante inconvenance qui est leur marque de fabrique. Par leur extraordinaire force d’inertie, elles ralentissent les œuvres de l’intelligence, servent d’amortisseur, de pare-feu, et nous protègent ainsi des ambitions toujours un peu hystériques des empires technologiques ou pseudo-scientifiques.

Mais leurs bienfaits vont plus loin encore. Par la blessure narcissique que leur révélation nous inflige, elles nous remettent à notre place et nous gardent de l’hubris prométhéenne. Elles nous aident en nous montrant nos limites. Croyons-nous ne pas en avoir besoin ? En ces temps de « wokisme » délirant, où beaucoup perdent toute mesure, il importe de nous souvenir de nos limites, de les voir à nouveau marquées sur notre chemin, et ne pas finir dans « l’impasse du wokisme » .

Ô puissante bêtise, montre-toi ! Car nous autres nains, tout juchés que nous soyons sur les épaules de géants*, avons grand besoin de ton épiphanie. Hélas, notre ignorance des limites croît plus vite que notre savoir. On savait pourtant depuis longtemps que l’homme ne sait pas l’histoire qu’il fait**. Cependant, il la fait, sans savoir ce qu’il fait, et toujours la chouette de Minerve ne chante qu’au crépuscule***.

Une crainte française : celle du ridicule

Mais trêve de cuistrerie et de citations ! Regardons-nous ! La peur de la bêtise, de la sottise, de la naïveté et de la niaiserie est un travers très français. Nos voisins belges n’en sont que rarement affectés, et c’est peut-être ce qui leur donne une part de leur charme délicieux. Toutefois, ces peurs françaises portent un autre nom, qui les résume : la peur du ridicule.

Ici, les vices sont sans conséquence, mais le ridicule tue.

Mémoires de la Comtesse de Boigne (1781-1866)
repris PAR RéMI WATERHOUSE dans Ses dialogues pour le film « Ridicule », réalisé par PATRICE LECONTE (1996).

Sans doute est-ce de cette peur-là que naît l’arrogance française, dont la réputation internationale n’est plus à faire. Dommage pour nous que l’arrogance ne soit pas répertoriée dans les critères des enquêtes PISA…


* Métaphore attribuée à Bernard de Chartres (XIIe siècle) et largement utilisée au fil des siècles par de très grands penseurs, comme Newton, Montaigne et Pascal. En 1972, la dernière mission lunaire Apollo 17 fut baptisée On the Shoulders of Giants par les responsables de la NASA…
** Formule attribuée à Marx et reprise par Raymond Aron et par une infinité d’auteurs…
*** Métaphore extraite de la préface des Principes de la philosophie du droit de Hegel. Elle signifie que la philosophie, c.-à-d. la science – car Minerve est la déesse de la sagesse dans la Rome antique – est toujours en décalage avec l’Histoire qui est en train de s’écrire.

Espoirs

Espoirs de l’animal ? Paisible pâture ou proie dodue…

Hélas, nous autres humains plaçons souvent nos espoirs dans les chimères qui naissent de nos ambitions.

Toutefois, au dessus de nos espoirs, parfois frivoles, capricieux, imprudents ou inconséquents, plane un souvenir. C’est celui du grand espoir de jadis, celui du Salut promis par Dieu. C’était un grand, très grand et puissant espoir, un espoir bien à la (dé)mesure de l’humanité. Mais la divinité, touchée à mort par le soupçon nietzschéen, ne nous est plus familière. Nous en sommes orphelins. Comment vivre désormais sans l’espoir d’un Salut ?

Il reste que l’espoir est ce moteur qui nous oblige à marcher, avancer, batailler. Il est notre unique ressource de vitalité. Où trouver à présent la source d’un espoir authentique ? Quelles ressources convoquer ?

Tout d’abord, la vie nous place à un endroit et à un moment du monde et d’une lignée. Ensemble, ils constituent notre « origine ». C’est là que nous est transmise la matière de la vie qui nous est échue. C’est avec ce matériau qu’il nous faudra faire au mieux.

Ce mieux, pour commencer, consisterait peut-être à accorder notre plus grande attention à ce temps, ce lieu, ce corps que nous habitons, et à la lignée qui nous y a porté. Nous trouverons dans cette « origine », sans avoir à la chercher bien longtemps, notre « originalité » et un espoir à notre véritable mesure.

Dans originalité, entendre origine,
Et génération dans générosité.
La langue nous offre son étrangèreté,
Sa puissance qui nous dépasse et nous domine.

Caresse du monde, N°97 (2021)

Espoirs : l’impasse du « wokisme »

Les lubies des « wokistes » nord-américains et celles de leurs empressés disciples européens, nous enjoignent de renoncer au donné. Il nous faudra nier qu’il reste de l’imposé. Il faudra qu’à toute force, rien ne demeure qui ne dépendrait pas de nous mêmes, qui ne serait pas à la portée de notre volonté. L’hybris du « wokisme » nous entraine dans un monde post-moderne qui n’est qu’un champ de ruines. Rien n’y échappe à la déconstruction. Dans ce monde-là, le corps lui-même n’est plus qu’une construction sociale ou mentale, que chacun croit pouvoir démanteler et recomposer à sa fantaisie, en mobilisant les ressources de la technologie*.

Une fois la génétique oubliée, l’anatomie méprisée et l’histoire réécrite selon le désir de chacun**, que pourra-t-il donc rester de notre « origine », celle-là même qui fait la substance de notre « originalité » ?

Origine & originalité

Cette ressource pourtant nous est précieuse entre toutes. Elle est le seul capital dont nous puissions jamais disposer. Tout être vivant est aussi un fossile,  écrivait Jacques Monod dans Le Hasard et la Nécessité (1970). Cette formule frappante nous rappelle que nous sommes tout à la fois trace et résultat des générations qui nous ont précédés au fil des millénaires. Comment un destin pourra-t-il encore se déployer sans cet espoir qui nous vient, avec une folle énergie, de notre passé le plus archaïque ?

Pour conclure, n’y a-t-il pas là comme un espoir pour nous porter ? Oublions ces espoirs imaginaires qui nous tireraient vers eux depuis ce futur qui n’existe pas. Recherchons plutôt un espoir qui surgirait de notre origine même. Ne pourrait-il pas nous transmettre une part, notre part, de la puissance de l’Histoire des générations ?


* (ajouté le 21 août 2022) : on lit dans Le Figaro d’aujourd’hui que le Planning familial affirme sans rire que Des hommes aussi peuvent être enceints. Pour ceux qui doutent encore de la capacité de nuisance du « wokisme », la lecture de cet article permettra peut-être de les détromper. Nous aurons, hélas, à y revenir !
**À la façon des soviétiques qui effaçaient toute trace des gênants sur les photographies et dans les archives, les « wokistes » aiment notamment à renverser les statues.

Déni, j’écris ton nom.

Silence, on égorge ! Et voilà que le djihadisme ne rencontre que notre déni et notre pusillanimité. Vous connaissiez déjà le déni devant les récents événements du stade de France, et bien d’autres dénis antérieurs et obstinés, si outrés qu’ils en deviennent comiques. Voici à présent le déni de ce « djihadisme d’atmosphère » que Gilles Kepel décrit dans Le Prophète et la Pandémie (Gallimard, 2021).

Pour une multitude d’affaires comme celle, notamment, de l’assassinat d’Alban Gervaise, la dimension djihadiste des actes est niée. Ces faits gravissimes et répétés se trouvent relégués dans la rubrique des « faits divers ». Dans la presse écrite nationale, Le Figaro, Le Point, Valeurs actuelles et Causeur auront été les seuls à traiter le sujet pour ce qu’il est, un meurtre commis au nom d’un certain  Allah.

Ce déni-ci n’est pas moins ridicule et humiliant que ces dénis-là, qui tous en silence proclament cette vérité : « Nous sommes aveugles, impuissants, soumis, défaits« . C’est aujourd’hui le temps des défaites qui ne sanctionnent aucun combat perdu. Être défait sans avoir combattu, c’est faire un pas de plus vers la soumission.

Homère chantait les héros victorieux et les armées défaites. Si, devant Troie, après dix ans de guerre, les survivants sachant encore pourquoi ils combattaient ne furent sans doute plus très nombreux, encore eurent-ils le courage du combat.

Silence, on égorge

Ce déni politico-médiatique se présente comme une sorte de défaite par prétérition. « La France n’est pas un coupe-gorge » clamait il y a peu un ministre de la République française, nous indiquant par là que, précisément, c’est ce qu’elle est devenue : un coupe-gorge en acte, et non plus métaphorique.

Silence, on égorge

« Causeur brise l’omerta médiatico-politique qui entoure un certain nombre de meurtres islamistes dont celui d’Alban Gervaise, ce médecin militaire tué à 40 ans devant l’école de ses enfants. Son portrait figure sur notre couverture. Pour Élisabeth Lévy, introduisant le dossier, il est mort deux fois: égorgé par le couteau de son meurtrier, enseveli par le silence de son pays. C’est ce refus du réel qui est sûrement le mal français le plus profond. » 

Causeur, numéro de l’été 2022

Le procès des attentats du 13 novembre vient de s’achever, mais dans la rue le spectacle continue. Silence, on égorge ! Les couteaux, les poignards et les machettes s’enfoncent dans la chair de la France. Ces lames assassines veulent défaire la France et sa civilisation. Le déni public vient couronner notre défaite.

Le déni : la défaite sans le combat

Défaites, le nouveau numéro de notre feuilleton poétique de l’année, nous parle de nos défaites intimes. Rien qui puisse être comparé à celles que le djihadisme inflige à notre pays tout entier. Ces défaites intimes ne sont toutefois ni moins douloureuses, ni moins humiliantes que ne l’est la pusillanimité de nos dirigeants devant nos ennemis. Ce sont des morts que l’on pleure dans tous les cas. Mort des amours, mort de l’espoir, mort des hommes, d’une nation, d’une civilisation. Aurons-nous eu du courage ? Aurons-nous su combattre pour ce, pour ceux que nous aimons ?

Défaites, Jean-Marie Sonet, BoD GmbH Ed (2022)
E-Book – ISBN 978-2-322-43835-8.

Mise à jour : Salman Rushdie

M.à j. du lundi 19 septembre 2022 : Il y a un peu plus d’un mois, le 12 août, vers 11 heures, à Chautauqua, dans l’État de New York, un nommé Hadi Matar poignardait Salman Rushdie, l’écrivain bien connu. C’est une fois de plus au nom d’un certain « Allah » que la tentative de meurtre a été commise. L’indignation chez nous a été ce qu’on pouvait craindre : déni et pusillanimité. Elle a rapidement disparu des radars. Un « fait-divers » de plus. Voici ce qu’en dit Céline Pina dans la dernière édition du magazine Causeur :

« Ce n’est (..) pas seulement la récurrence des attaques meurtrières qui crée le désespoir, c’est surtout cette attente éternellement déçue d’une réaction à la hauteur. Les Français ne croient plus que l’accumulation des crimes va enfin ouvrir les yeux de la classe politique sur la dangerosité de l’idéologie islamiste, la réalité de son entrisme dans les associations et institutions, et sa capacité à imposer ses codes (voile, hallal, radicalité religieuse). »

Céline Pina, Causeur, 18 septembre 2022

Les colères ne naissent pas toutes égales en dignité.

Les colères ne sont pas toutes égales en dignité. Le procès des attentats du 13 novembre 2015 vient à peine de s’achever. Les condamnations ont été prononcées. Mais ce procès nous a remis en mémoire les heures terribles, interminables, de cette tragédie.

Cette série d’attentats s’ajoute à la longue liste des exactions conçues, organisées et menées contre la France. Et par qui ? par un islam politique aux mille visages hideux. Ceux de la grande colère de l’islam qui depuis des années, endeuille la France et la déstabilise. Cette colère de l’islam est laide, immonde, répugnante, à vomir, à hurler. Non, décidément, toutes les colères ne naissent pas égales en droit et en dignité.

Déni et pusillanimité

Jadis, on disait aux enfants que la colère enlaidit. Mais le dit-on encore ? Et le contraire de la colère n’est-il pas l’oubli, l’indifférence, le déni, la pusillanimité, voire la complaisance ? N’est-ce pas, dans le meilleur des cas, un faux-nez de la soumission, qui n’est pas chose moins laide ?

Hélas ! Qui osera encore lancer à un fâcheux, ainsi qu’un Maupertuis défiant un Mendoza : « Je ne vous aime pas et vous êtes laid ! » ? Et quelle meilleure réponse à la colère ?

Les fâcheux en effet ne méritent que fâcheries. Mais ces fâcheux pullulent. Ils infestent le monde, aussi la colère enfle-t-elle, et cette enflure n’est que prélude à explosion ou implosion.

Vers quel avenir nous dirigeons-nous à présent ? Que faire, au moins pour calmer les tendances les plus délétères de l’islam ? Quelle moyens pour lui imposer le strict respect de la liberté de conscience de tous les Français ? Comment faire entendre clairement à l’islam que le concept d’apostasie n’est pas recevable en droit français ? Comment les persuader qu’en conséquence, il est loisible à quiconque de changer de religion, et que harcèlement, menaces et violences à l’encontre de ceux qui souhaitent quitter l’islam – ou le moquer – sont autant de crimes.

Ce devrait être là un souci et une priorité de nos dirigeants. Hélas ! C’est le déni qui est la plupart du temps au rendez-vous. Les coups de poignard tombent et retombent, mais ne réveillent pas grand monde dans notre beau pays.

« Détruire ! » dit la colère. « Déconstruire ! » répond la soumission. Les colères ne naissent pas toutes égales en dignité. Les huit poèmes de ce sixième numéro du feuilleton poétique de l’année 2022 vous le vont démontrer.

Mise à jour : Salman Rushdie

M.à j. du lundi 19 septembre 2022 : Il y a un peu plus d’un mois, le 12 août, vers 11 heures, à Chautauqua, dans l’État de New York, un nommé Hadi Matar poignardait Salman Rushdie, l’écrivain bien connu. C’est une fois de plus au nom d’un certain « Allah » que la tentative de meurtre a été commise. L’indignation chez nous a été ce qu’on pouvait craindre : déni et pusillanimité. Elle a rapidement disparu des radars. Un « fait-divers » de plus. Voici ce qu’en dit Céline Pina dans la dernière édition du magazine Causeur :

« Déni à gauche, condamnation à droite, ambiguïté au gouvernement : les réactions qui ont suivi la tentative d’assassinat de Salman Rushdie montrent une fois de plus qu’on a du mal à nommer le mal islamiste. Quant aux « représentants officiels » de la communauté musulmane, ils ont brillé par leur silence. »

Céline Pina, Causeur, 18 septembre 2022

Football et géographie.

Chers lecteurs Britanniques, vous qui êtes légion*, je vous remercie vivement pour votre intérêt pour mon activité. Néanmoins, je me pose une question : le football et la géographie font-ils bon ménage ?

Je crains en effet que certains d’entre vous ne se soient dernièrement montrés très injustes avec la France. Ce fut à l’occasion d’un récent et mémorable match de football. Le match en question se tint dans un endroit curieusement dénommé « Stade de France ». C’est ce nom, sans doute, qui vous aura fait croire que ledit stade se trouvait en France. Hélas ! une fois sur place, vous ne pûtes que constater votre erreur.

Chacun sait que les Britanniques sont fort ignorants en matière de géographie. Les Français, eux, sont naturellement très doués pour cette discipline. Comme d’ailleurs pour beaucoup d’autres disciplines, ainsi que le démontrent leurs brillants résultats dans les palmarès internationaux de niveau scolaire).

En effet, ils étudient le football et la géographie dès leur âge le plus tendre. Par exemple, ils savent parfaitement situer l’Angleterre sur une carte du monde. J’en veux pour preuve la copie qu’un petit Gérald, excellent élève de CM2 remit jadis à sa maîtresse. Cet enfant était promis aux plus hautes fonctions dans l’État.

Un groupe de Français s’est justement révolté contre votre méprise. Après de rudes efforts, il a en effet réussi, après une enquête approfondie, à reconstituer toute l’affaire. Ces enquêteurs ont produit le précieux document qui illustre cet article. Il s’agit d’un fac simile de la copie du petit Gérald. Celle-ci démontre, à toute personne de bonne foi que ce furent bien des Anglais qui provoquèrent le tumulte qu’on sait.

Il va sans dire que cette copie de copie, largement diffusée sur Twitter, semble parfaitement authentique.

Honni soit qui mal y pense, comme vous dites si bien.

* Londres serait-elle vraiment la 6ème ville française, comme le prétendait Boris Johnson ? Près de 30% des visiteurs de mon site se connectent depuis la Grande Bretagne. La quasi totalité d’entre eux depuis la région de Londres. À titre de comparaison, les visiteurs localisés en France n’arrivent qu’en 4ème position avec moins de 15%, derrière les USA et l’Allemagne.

Fantaisies

Fantaisies, est le cinquième numéro du feuilleton poétique de l’année 2022, sept poèmes tentent de s’échapper du registre habituel, voire sempiternel, du tragique ou mélancolique. Ici, la poésie s’amuse d’elle-même, au risque de verser dans la parodie ou les bouts-rimés

Ces sept poèmes souhaitent que leur lecteur puisse en sourire, et que ce sourire s’élargisse aux dimensions d’une vallée.

En cadeau de bienvenue au lecteur, ci-dessous Oubli, un poème du e-Book du mois de juin 2022.

À propos de « Fantaisies » E-book n°5 du feuilleton poétique de l’année 2022

Oubli

En avez-vous perçu la raréfaction ?
Toujours, dans les tiroirs, les petites cuillères
Se cachent, s’évaporent jusqu’à la dernière,
S’évanouissent quand faiblit l’attention.
 
Qui porte attention aux petites cuillères ?
L’indifférence explique leur démission.
Comme des éléphants qui font désertion
Elle s’éclipsent vers un secret cimetière.
 
Celles qui sont d’argent déjà font grise mine.
Les inoxydables de haut les examinent,
Se pensent à l’abri ; c’est une illusion.
 
Au dépôt d’ordures, elles sont moins malignes.
Les ingrats qu’elles nourrissaient les éliminent,
En achètent des neuves. Ô dérision !

Fantaisies, Jean-Marie Sonet, BoD GmbH Ed (2022)
E-Book – ISBN 978-2-322-42019-3.

Déconstruire, disent-ils*

À propos de Forteresse : La nomination cette semaine d’un déconstructeur de premier rang** au poste de ministre de l’Éducation nationale m’a donné envie d’attirer votre attention sur Forteresse, un poème que m’avaient jadis inspiré les déclarations fluides d’un candidat-président postmoderne qui aura, hélas, tenu ses promesses.

Forteresse

Penser est au risque de se payer de mots.
C’est une monnaie fluide, aimée des post-modernes.
Le droit est son idole, devant quoi se prosternent
Ceux qui aiment à ester près les tribunaux.

Pris dans la forteresse de leurs idéaux,
Derrière des remparts dépourvus de poterne,
Ils vont, sempiternels, chercher qui les gouverne.
Leur grâce est un espoir de gloire en vidéo.

Nous implorons le doux soutien de la bêtise.
Qu’elle ne nous fasse ni défaut ni traitrise,
Mais ruine le faux dieu de ces tristes dévots,

Répande le baume de la méconnaissance
Des lexiques amers, déconstruisant la France,
Intersectionnels et post-coloniaux.

Extrait de Caresse du monde, n°93 (© Jean-Marie SOnet, 2021)

* Le titre de cet article fait évidemment référence au « Détruire, dit-elle », titre d’un roman de Marguerite Duras (Les Éditions de Minuit, Paris, 1969, ISBN 2-7073-0136-1), roman qu’elle adaptera elle-même dans le film homonyme (1969).

** voir aussi à ce sujet, l’article de François-Xavier Bellamy dans le même journal.

Le Visiteur de Dnipro

Les rapports de fréquentation de mon site d’auteur transmis par l’hébergeur sont précis. Ils vont jusqu’à m’indiquer parfois la position géographique de mes visiteurs. Or, depuis des semaines, des mois à présent, j’ai la surprise de voir des connections sur mon site régulièrement enregistrées depuis la ville ukrainienne de Dnipro.

Impossible d’écarter l’hypothèse que ce visiteur ne soit qu’une machine, un de ces spiders robotiques qui poursuivent inlassablement leur travail, ignorant tout du monde. Mais ce peut être, plus probablement, un être humain, femme ou homme, Français peut-être, francophone sûrement, qui s’intéresse ainsi à mes publications.

Peut-être y trouve-t-il  l’occasion d’entendre parler d’autre chose que de la guerre et de ses combats, de respirer un air un peu plus léger, et tenter de chasser l’angoisse et le désarroi de son esprit.

Le regret de l’Europe aux anciens parapets

Il faut bien l’avouer, l’actualité militaire manque souvent de poésie et d’humour. et il ne faut pas compter sur Vladimir Poutine pour nous remonter le moral. La Russie ne serait-elle plus qu’un bateau ivre que sa course entraîne à ravager l’Ukraine pour venger son regret de l’Europe aux anciens parapets ?

Dnipro, capitale éponyme de son oblast, comptait avant la guerre un million d’habitants. Elle s’étend au bord d’un de ces immenses fleuves d’Europe centrale, dont mon professeur d’histoire-géographie au lycée nous disait déjà, dans les années 70 du siècle dernier, qu’ils étaient « non des fleuves, mais des catastrophes ! ».

Un million d’habitants à Dnipro hier. Aujourd’hui combien ? Les volontaires sont partis combattre mais des vagues de réfugiés viennent s’y abriter. Qui êtes-vous, cher visiteur ? Éclairez-moi ! N’hésitez pas à me laisser un message. Il est bien intimidant de se trouver ainsi en un contact aveugle avec cette Europe orientale que je connais si peu et si mal. Cher inconnu lointain, je vous salue bien bas et prie pour vous et votre pays. 

Sic transit

Sic transit gloria mundi : Ainsi passe la gloire du monde. La phrase ne s’adresse pas seulement aux puissants du jour, mais surtout à l’universel délire de toute-puissance qui s’exprime et s’imprime avec une force particulière dans la société post-moderne, jusque dans la langue et dans les corps. 

« Le réel, c’est quand on se cogne », disait Lacan. La force des coups reçus est à la mesure de notre prétention à la toute- puissance. À l’heure de l’extension du domaine du safe space, qui veut encore se cogner ?

Sous les coups, le temps s’échappe, la vie s’accélère, le possible s’éloigne et disparaît avec la vie. Reste la contemplation des fragments qui surnagent. «Aphrodite estropiée montre encore la beauté ». 

Ce numéro 4 du feuilleton poétique de l’année 2022 regroupe neuf poèmes choisis dans le recueil Caresse du monde

« Older posts Newer posts »

© 2024 De grands appétits

Theme by Anders NorenUp ↑

Plugin WordPress Cookie par Real Cookie Banner